mercredi 31 août 2011

Le génocide indien



LE GÉNOCIDE INDIEN
  
"Et toi-même, dirent les indigènes au Blanc en montrant sa figure,
 n'es-tu pas, toi aussi, nu quelque part ?"
"Bien sûr, mais c'est là mon visage".
"Eh bien , répliquèrent-ils, chez nous c'est partout le visage".
 
"Ils nous tuent parce que nous travaillons ensemble,
 mangeons ensemble, vivons ensemble, rêvons ensemble".

PAROLES INDIENNES
 
La "Conquête du Nouveau Monde" fut consécutive d'un des plus grands génocides que la terre ait connus : la destruction des indigènes, les Indiens.

Lorsque les marins portugais et espagnols débarquèrent sur la côte apparue, après plus d'un mois de navigation, ils découvrirent d'abord une île à la végétation luxuriante. Accueillis par des êtres étranges, au visage peinturluré, qui parlaient une langue inconnue et désignaient leur terre par le vocable "Guarani", Christophe COLOMB et ses acolytes s'empressèrent d'en prendre possession au nom de la Reine d'Espagne, l'Église catholique et romaine. Le genou à terre, et se signant de la croix, le conquérant exalté s'annexa les terres nouvelles et donna à l'île le nom SAN SALVADOR.
 
Christophe COLOMB avait obtenu de la Reine d'Espagne, commanditaire de l'aventure d'exploration, l'octroi du dixième des richesses accaparées. Aussi, était-il pressé par la récupération des terres, biens et trésors. Le conquérant génois fut le responsable de la plus grande razzia sur un pays sans défense, pour la plus grande gloire de l'Église catholique et romaine, de la monarchie.
  
D'abord les indigènes furent flattés par des cadeaux de bienvenue. Pratiquant une hospitalité innocente, ils échangèrent des objets divers, dont des ornements que les Conquérants prirent, d'abord, pour de la pacotille. Puis, après vérification, ils s'aperçurent que le métal utilisé était de l'or pur. Alors la folie furieuse s'empara des envahisseurs.
 
En une première étape, les Barbares troquèrent tous les objets de camelote qui jonchaient les cales des caravelles, contre les autres ouvragés en métal précieux. Les indigènes crurent, au départ, qu'il s'agissait aussi d'or, ignorant les mystères de la chimie occidentale du fer et de l'acier, du cuivre surtout. Ils prirent ce dernier pour semblable à leur or. Mais, rapidement, ils découvrirent la duperie car le métal jaune des envahisseurs verdissait (le vert de gris) et ils s'en plaignirent auprès de ceux qu'ils considéraient comme des demi-dieux. Ils comprirent aussitôt qu'ils avaient été trompés et trahis dans leur confiance.
 
Les conquistadores s'étaient empressés de coïter les femmes et avaient distribué de l'alcool en abondance. Les Indiens l'appelaient l' "eau de feu". L'ivresse provoquée les plongea rapidement dans la dépendance. Ils se démunirent de tous les objets précieux qu'ils avaient fabriqués (véritables trésors) pour se procurer de l' "eau de feu" ; pour eux, elle devint rapidement l' "eau de mort". Les Colonisateurs méprisaient,  en un immense orgueil latin, l'innocence des indigènes. Ils commencèrent par réprimer toute velléité de révolte de la part des Indiens qui venaient de comprendre à qui ils avaient affaire: des voleurs, bandits sans scrupules qui convoitaient leurs terres,  femmes, sœurs, filles et biens.
 
Baissant le masque, les conquérants du Nouveau Monde devinrent alors violents. Ils pillèrent les temples païens de leur or. Un immense saccage du patrimoine culturel et vital, des Indiens, débuta. Des armées entières débarquèrent sur le nouveau continent, après le retour de Christophe COLOMB, en Espagne. Possédant la supériorité des armes sur les "Sauvages", les conquérants n'eurent aucune peine à les réduire en quasi esclavage. Expropriés de fait, au nom de Dieu, du Roi et de la Reine, les Indiens étaient devenus des étrangers sur leur propre patrie. Exclus de leurs traditions et coutumes, complètement déstructurés, l'Église catholique et romaine les obligea, rapidement, à épouser le Christ et les évangiles. Les Résistants furent systématiquement réprimés par l’Occupant. Comme il en fut dans les colonies et pour les Hérétiques en France, la "guerre sainte" fut déclarée contre les Indiens d'Amérique.
 
Les coutumes indiennes étaient pastorales. Certes, répartis en tribus souvent rivales, les indigènes se battaient quelquefois entre eux. Mais les petites guerres ne dégénéraient pas en conflits aussi meurtriers que ceux d'occident ; encore moins en génocide. Sous le prétexte que les Indiens sacrifiaient à des divinités païennes, l'Église catholique et romaine justifia une répression impitoyable. D'abord, elle fustigea l'usage des plantes "démoniaques" comme le "peyotl" (petit cactus mexicain) qu'elle interdit au nom de la religion judéo-chrétienne. Puis elle les obligea, sous peine de mort, à embrasser de nouvelles croyances. Ainsi le grand CUAUHTEMOC "L'Aigle qui descendit", Grand Prêtre de la religion Aztèque, sectateur du Peyotl et dernier empereur de l'Anahuac, que les conquistadores chrétiens avides d'or torturèrent par le feu et pendirent le 21 août de l'an de grâce MDXXII.
 
Parallèlement, les armées barbares profitaient du moindre prétexte évangélique pour décimer des peuplades entières d'Indiens (les Incas, Aztèques, Apaches, Sioux, etc...). Leur espace vital fut rétréci comme une peau de chagrin. Bientôt ils n'eurent plus que des enclos où ils étaient parqués, comme du bétail. On avait inventé les "Réserves". Au nom du sacré cœur de JÉSUS, les conquistadores brandissaient des sabres et épées en forme de croix. Leurs fusils crachaient le feu et le plomb. La guerre était devenue sainte. Des femmes étaient pendues à des crocs de boucher, leur ventre ouvert d’où sortaient les entrailles et, parfois, leur fœtus qui était jeté aux chiens. Sacré, le conflit l'était surtout devenu pour les derniers Indiens survivants. Leur survie dépendait de leur seul courage. Car les envahisseurs blancs fonçaient maintenant sur les "Réserves" elles-mêmes, au mépris des conventions gouvernementales de protection. La Communauté indienne était en voie de disparition.
 
L'armée des Blancs arrivait toujours à vaincre les paisibles indiens abrités à l'intérieur de misérables tentes (les wigwams), en compagnie des vieux et plus jeunes, de leurs femmes (les squaws), et de rares lamas (animaux des plaines). De véritables bandits et assassins fonçaient sur les modestes abris indiens et tuaient tout ce qui vivait : hommes, femmes, enfants, animaux. Puis ils mettaient le feu. Obligés de se défendre, les Indiens étaient accusés de sauvagerie et, sous ce prétexte qui fut une inculpation, le lendemain, les Blancs venaient annexer le nouveau terrain devenu libre de tout habitant. Et pour cause... La spéculation avait commencé et les Indiens détenaient, pour certains encore, quelques terres trop bien placées au gré des "vautours blancs". Il fallait éliminer les Indiens pour les spolier de leurs biens. De véritables "camps de concentration" furent aménagés pour le parcage des rares tribus indiennes ayant échappé à un véritable génocide : il s'agissait, par euphémisme, de "Réserves".
 
Les mentalités sont restées toujours aussi sauvages et, plus tard, les Blancs continuèrent de décimer les Indiens en Amazonie, pour prendre leurs terres. Au début, ils lancèrent du haut d'hélicoptères des chemises contaminées par les virus de la grippe (mortelle pour les Indiens), puis le germe de la variole. Déjà, les Indiens Alakaloufs de "Terre de feu" avaient été éliminés par les missionnaires protestants qui les avaient obligés à se vêtir sous le prétexte qu'ils vivaient nus et que cela était indécent. Or, sous ces climats où alternent des vents violents et pluvieux, froids, avec des périodes de chaleur étouffante, il fallait vivre nu car un tissu adipeux s'élaborait pour jouer le rôle de régulateur thermique. Obligés de se vêtir, sous le prétexte de vertu chrétienne, les indiens moururent tous de pneumonie. Leurs terres devinrent libres pour les Envahisseurs, rusés et assassins. Les Indiens n’avaient plus d'existence légale ; ils avaient été spoliés de leurs biens et l'immense continent qui leur appartenait de droit.
 

L'Occident ne peut donc pas s'enorgueillir de ce qui reste, pour l'histoire, un des génocides les plus terribles que notre monde ait connu. Avec le massacre des Arméniens par les Turcs, celui des Indiens d'Amérique par les conquistadores et aventuriers venus d'Europe, celui des Juifs par les nazis, le bilan est lourd de menaces pour l'avenir. Car la balance de la justice cosmique rétablit, tôt ou tard, l'équilibre des choses. Si notre monde avait été plus intelligent, il eut suffi de respecter les Indiens du nouveau monde, sans s'imposer. La vraie nature profonde de l'Homme est le partage, le désir d'apprendre et d'aimer ; elle n’est pas le meurtre et l’assassinat. Si les Espagnols et Portugais, qui envahirent le nouveau monde, avaient été plus évolués, les Indiens leur auraient donné ce qu'ils pouvaient et, surtout, échangé leurs connaissances en un partage fécond. Une autre civilisation aurait vu le jour. Tant que l’Homme n’aura pas éradiqué l'esprit de conquête, l'envie de coloniser, de mettre en cage, de dominer, d'exploiter et de détruire il ne sera pas Humain; un Prédateur seulement. Le moyen âge est encore de notre époque; peut-être même la préhistoire!
 
Piètre contrition pour les conquistadores et autres aventuriers, l'occident leur dut un cadeau..., empoisonné : la syphilis. Cette maladie fut importée par les marins de Christophe COLOMB, en Espagne. Ce fut la "maladie espagnole", qui s'appela ensuite la "maladie italienne" puis "française". Le vecteur de la contamination serait un animal : le Lama qui est porteur sain du tréponème pâle, comme pour le cheval qui l’est pour le germe du tétanos.
 
Les Indiens leur avaient donc tout donné; avec les intérêts mêmes qui ont pu couvrir la dîme réclamée par Christophe COLOMB, à la reine d'Espagne, en récompense de ce qui fut et restera pour la mémoire collective la plus gigantesque ignominie que la terre ait comptée: "la Conquête du Nouveau Monde".

dimanche 28 août 2011

Le discours de KRISHNAMURTI (Prolégomènes) - 1° partie




LE DISCOURS DE KRISHNAMURTI
(Copyriht 1990 - Reproduction interdite)
 
"Le ciel et la terre, si majestueux, sont muets".
 
TCHOUANG TSEU
 
PROLÉGOMÈNES
 
KRISHNAMURTI fut pressenti comme l'avatar du CHRIST, revenu sur la terre pour fonder une nouvelle religion, par Annie BESANT, Madame BLAVATSKY et Monseigneur LEADBEATER (Évêque de l'Église gallicane), les principaux protagonistes d'une aventure qui tourna court au grand désarroi de tous les théosophes qui avaient fondé leurs espoirs sur cette idée. Tout avait été prévu, arrangé pour la réussite de cet immense projet qui devait assurer l'hégémonie de la Société Théosophique, sur toute la planète terre. Pourtant, tout échoua à cause d'un grain de sable qui servit de détonateur à la prise de conscience, pour KRISHNAMURTI, que l'on voulait le manipuler pour le bien des autres. Le harcèlement sexuel, dont il fut l'objet de la part de Monseigneur LEADBEATER, si l’on en croit l’Histoire, fut cet élément révélateur .
  
L'Ordre de l'Étoile d'Orient avait été fondé à Bénarès en 1911, dans l'attente de la venue du Grand Instructeur. Cet espoir messianique reposait sur le jeune KRISHNAMURTI, alors âgé de 15 ans. Annie BESANT, présidente de la Société Théosophique, avait distingué le jeune Homme comme susceptible de cristalliser les espérances de la secte. Mais, ce fut sans compter avec la personnalité de celui-ci.
 
Il fallut, en effet, un caractère supérieur pour résister aux charmes d'une vie toute tracée, à l'abri du lendemain, couverte de gloire immédiate, divine, et de profits substantiels. Ardemment assoiffé de Vérité, KRISHNAMURTI se concentra d'abord sur son avenir, tel que sa conscience profonde l'appréhendait. Alors que les adultes, pressés par la réussite de leurs idées, l'interrogeait sur sa conviction intime de Sauveur, il répondait sagement "qu'il ne savait encore rien". Serait-il un Médiateur entre une Entité Surhumaine et les Hommes ? Son corps deviendrait-il le véhicule d'une conscience supérieure à la sienne ? A ces questions puériles, et à bien d'autres encore, il répondait raisonnablement "qu'il ne savait rien..., sauf qu'il voulait savoir et comprendre tout".
 
Au mois de janvier 1927, après seize ans de recherche, d'angoisse spirituelle et de résistance acharnée aux harcèlements multiformes dont il faisait l'objet, KRISHNAMURTI trouva enfin sa délivrance : l'union avec la vie. Alors seulement il commença à s'exprimer. Étant libéré, il devint libérateur.
  
KRISHNAMURTI remit tout en cause, les gens et les choses. Surtout, il dénia tout messianisme qui ne pouvait être que charlatanesque, à ses yeux, car nul ne peut être sauvé que par soi-même ; sans l'aide de DIEU, du DIABLE ou du CHRIST (inventions humaines). Ce changement radical fut diversement ressenti par les mentalités qui l'accusèrent de trahison, pour la plupart. Les uns comprirent un peu ; d'autres, plongés dans leurs théories fumeuses et leurs systèmes, ne comprirent rien. Le "messie des Théosophes", comme l'appelaient les journaux, était plus déconcertant pour ceux qui lui avaient préparé un cadre, que pour le "vulgum pecus".
   
En conséquence KRISHNAMURTI, chef de l'Ordre de l'Étoile d’Orient, décida de le dissoudre.


"Gnose et Gnosticisme" (Etude sur la Gnose interdite) par Edmond FIESCHI, paru aux Editions A.C.V. à Lyon (Rhône) - France.
(Toute publication, d'une autre origine, serait une escroquerie ; nous remercions toute personne, en ayant eu connaissance, de nous en informer aux fins de poursuites judiciaires).

"Initiations à la Lumière d'Orient" par Edmond FIESCHI, paru aux Editions A.C.V. à Lyon (Rhône) - France.


samedi 27 août 2011

Esprit es-tu là ?



ESPRIT ES-TU LA ?
  
  
Si tu es là, frappe un coup ; si tu n’es pas là, tape deux coups. Le mauvais esprit frappe toujours deux fois, comme chacun le sait.
 
La scène se déroule dans une classe de philosophie, sous la présidence d’un Prof’ aux cheveux touffus et regard charbonneux. Quand il pose une question il ferme automatiquement l’œil droit et ouvre le gauche; lorsqu’il entend une réponse, il le ferme et ouvre le droit. Quand il parle, les deux yeux sont ouverts. Ses élèves l’appellent, irrévérencieusement, le « Grand Clignotant ». Ce jour-là, le thème était : le Silence.
   
- « Aujourd’hui, nous allons disserter sur le silence. Quelqu’un peut-il me dire ce qu’est le bruit ? Oui ! Ah, vous là-bas, CANCRE – Là. Je vous écoute ».
 
« M,sieur, le bruit c’est ça ! »
 
Et il frappe, fort, sur le pupitre de son bureau, avec le poing. La classe s’esclaffe.
 
- « Cela ne m’étonne pas de vous, CANCRE-Là ! Y a-t-il un esprit supérieur qui a une autre approche, une idée ? Ah, vous CANCRE-Ici. Je vous entends ».
 
« M,sieur, le bruit c’est quand mon voisin pense ; il y a des grincements dus à la rouille ».
 
- « Allons, un peu de sérieux ! Vous là-bas ? »
 
« C’est quand un milliardaire dit que l’argent n’a pas d’importance et que le pauvre pense pareil » !
 
- « Ah, c’est mieux ! Voilà de la graine de philosophe. Quel second degré dans la métaphore ! Admirable. Un autre ? »
 
« C’est quelqu’un qui dit qu’il fait le bien autour de lui ».
 
- « Bien ! C’est mal de dire que l’on fait le bien ! Le bruit de l’orgueil ne fait pas de bien ; le silence de l'humilité, oui. Un autre ? »
 
« C’est quand ma sœur ronfle, la nuit ; j’ai beau lui dire que  ronfler nuit, elle nuit ».
 
- « Est-ce tout ? »
 
« Non M,sieur, j’ai mieux. Depuis qu’un auteur a écrit : « entends-tu ce silence », tout le monde en parle. Quel vacarme, quel tintamarre de cervelles ».
 
Le Prof’ ouvre les deux yeux ; il va donc expliquer.
 
- « Déjà, nous constatons que beaucoup de bruit existe autour du silence. D’ailleurs, c’est la condition sine qua non de l’un et l’autre. Sans contraste, rien n’existe. Le silence est, à condition de pouvoir entendre le bruit. Mais il faut mettre un bémol à ce constat car il n’y a pire sourd que celui qui ne veut rien entendre. »
 
« M,sieur, moi j’ajouterai une dièse à votre note en disant qu’un silence n’est pas un soupir ; il y a le silence du Sage et le soupir de l’idiot ; ou bien l’inverse. »
 
Le Prof’ plisse l’œil.
 
- « Quelle est la nature du silence ? Je vous écoute CANCRE-Là »
 
Il plisse l’autre œil.
 
« D’être, tout simplement » !
 
- « Ah ? Oui, CANCRE-Ici ».

« De ne pas exister, tout simplement ! Afin d’être. »
 
- « Vous voulez me faire croire que vous avez lu SHAKESPEARE ; j’eus souhaité entendre « to be or not to be, that is the question ». Quand est-ce que vous allez m’étonner, un jour, vous deux là-bas ? Mais il n’est pas interdit d’espérer. Vous faites des progrès depuis quelque temps. »
 
Le Prof’ clignote puis ouvre grand ses quinquets.
 
- « Messieurs, comme d’habitude je constate l’énorme travail qui est le mien. Vous serez, assurément, des Philosophes un jour car la vie s’en chargera ; toutefois, vous ne l’êtes pas encore, aujourd’hui, et il nous faut avancer. Des tonnes de livres ont parlé du silence. En Asie, dans les pays bouddhistes excellemment, depuis des millénaires quelques « coupeurs de cheveux en 4 » ont meublé le Vide de traités bruyants sur la notion de silence. Si vous étudiez, un jour, les philosophies bouddhistes vous constaterez combien ce sujet occupa, occupe toujours, leurs cerveaux en un tumulte permanent. A telle enseigne qu’il n’est pas incongru de constater que, jamais, le Silence n’aura fait autant de Bruit. Aussi, la meilleure étude sur le Silence se résumera à l’appliquer. Je réclame donc une minute de silence ».
  
« Chut », cria CANCRE-Là. « Chut » reprit CANCRE-Ici. « Chut » entonnèrent en chœur tous les autres membres de la classe.
 
Le Prof’, les yeux malicieux, se leva et lança, d’un ton ironique :
 
- « Messieurs, vous avez répondu avec justesse au sujet du silence. Avec bruit, cela va de soi. Car il est l’Intelligence du Sage et la Prudence de l’Ignorant. Il constitue la clef intérieure de la Supra Conscience. Découvrez-la et souvenez-vous en toute votre vie. Et ce sera ma chute. Chut, bien sûr et ne le répétez surtout à personne. Car, et cœtera ! »
 
Il fit un geste avec sa main droite et tourna les talons. En riant, bien sûr, mais pas trop néanmoins. Il ajouta, brièvement :
  
- « Le sujet de votre dissertation est : « Quel est le sens de la phrase du Philosophe : L’orange est bleue ». A me rendre dans la semaine, en quinze pages recto verso et dactylographiées en petits caractères et à l’écartement minimum. Je veux du travail personnel ; pas de compilation, ni de plagiat. J’exige que vos tripes accouchent de vous-mêmes. Je veux des Philosophes de l’Être ».
  
Les élèves se levèrent, silencieusement. L’un commenta :
  
« Une orange bleue ? Il était daltonien ! Qu’est-ce que je vais pouvoir répondre, moi ? Il est terrible le « Grand Clignotant » !
   
« Moi, je sais ce que je vais écrire », affirma CANCRE-Là.
  
« Moi aussi », reprit CANCRE-Ici !
 
« Ah ! Quoi donc ? »
 
« Pour un scientifique, le raisonnement pourrait être le suivant : Une orange n’est pas bleue, sauf modification génétique qui n’existait pas à son époque. De plus, le Philosophe ne souffrait d’aucune anomalie neurologique, à plus ample informé ; se serait-il nommé Arthur RIMBAUD, ou HITLER et l’un de ses sbires, que j’eus suspecté l’absorption de mescaline (Peyotl) qui a la propriété de transformer les sons en couleurs et de provoquer d’autres hallucinations visuelles et auditives. Non, il s’agit d’un authentique Philosophe, d’un réel Aristocrate de la pensée et du sentiment. Donc, il faut réfléchir au 3° degré de compréhension. »
 
« Quoi donc ? »
 
« Le Philosophe a pu vouloir signifier que, vue de l’esprit, la couleur pouvait s’apparenter à la notion de Dogme. Ne pas être dogmatique et, comme l’enseignait Charles PEGUY, casser les idées pour voir au-dessus et plus loin. En réalité, il convient de ne jamais s’identifier à un concept, une notion qui, toutes deux, relèvent d’Hypothèses inhérentes à l’Existence. »
 
Le Prof’, qui avait tout entendu, s’approcha du groupe d’étudiants en jachère :
 
- « Vous avez presque tout compris. Cependant, méfiez-vous, car si vous aviez affaire à un psychiatre, vous seriez enfermés dans un asile psychiatrique. Les psychiatres ne sont pas des philosophes ; ce ne sont que des techniciens. Un psychologue comprendrait mieux ; et encore. Les Sciences Humaines n’en sont qu’au balbutiement et la psychiatrie n’a que 8O ans d’âge. Elle se cherche et n’oubliez jamais que, pendant la guerre 1939/1944, les malades mentaux étaient gardés, à l’hôpital du Vinatier à Bron (Rhône), par des anciens détenus libérés des prisons pénales Saint Paul et Saint Joseph de Lyon (Rhône). C’est le psychiatre LEMOINE, chef de Service dans ce même hôpital, qui vient de publier tous les scandales de malades mentaux, croupissant dans leurs déjections, meurtris par les coups des « matons » recyclés infirmiers psychiatriques ; certains débiles dévoraient leurs doigts en pensant qu’il s’agissait de lutins. C’est une référence mais il a provoqué la colère de tous ses confrères ; et pour cause. Pour un psychiatre, un Philosophe est presque toujours un fou. Méfiez-vous ; toujours ! La vie, c’est de rester sur ses gardes, sans cesse. On ne peut avoir confiance en personne ! Et ce sera la justification du Silence ; non dogmatique. »
  
- « Ah ! Méfiez-vous des gens trop riches ! Ils souffrent du syndrome de Diogène-Harpagon-Icare ; ne les fréquentez jamais et, dès qu’ils se révèlent à vous, rejetez-les. Car :
 
« On ne ramasse pas l'argent à regonfle sans le tirer de la poche de quelqu'un. »
 
Maxime des canuts lyonnais.
  
- « Une personne trop riche est tellement infatuée d’elle-même, que tous les humains ne sont, pour elle, que des objets qu’elle dominera avec superbe. Elle se croit tout permis... Les vertus du Silence sont inaccessibles aux Riches. »
  
Le silence s’installa sur les pupitres et, à la gloire de ses pouvoirs, on n’entendit plus que le grincement des plumes sergent major qui distillaient, sur le papier pâli par le temps, les miracles de la pensée non enchaînée.

vendredi 26 août 2011

La vérité sur KRISHNAMURTI ou la falsification des choses



LA VÉRITÉ SUR KRISHNAMURTI OU LA FALSIFICATION DES CHOSES
 
Boris PASTERNAK l'a dit : "L'instinct grégaire est le refuge de l'absence de dons". Cette maxime se vérifia, tout le long de l'affaire KRISHNAMURTI.

A la suite de sa démission, au sein de l'Ordre de l'Étoile d'Orient, KRISHNAMURTI fut le prétexte à la récupération et à la falsification de sa démarche, par des personnes soucieuses de sauver le navire, pour des raisons diverses et variées. La Société Théosophique supplia KRISHNAMURTI de désigner un Président. Il choisit une Présidente en la personne d’une Indienne ; obligé, ainsi, à une concession.

Un entretien, qui se déroula quelque temps après le discours de KRISHNAMURTI, entre un ancien disciple et de pseudo maîtres, révèle la subtilité dans une certaine dialectique qui visa à ébranler la valeur et la validité de l'acte de dissolution. Il n'y eut point d'argumentation réelle, de la part des réfractaires. Le raisonnement logique fut oblitéré au profit d'affirmations péremptoires, objet d'un quasi monologue narcissique s'articulant autour de phrases ampoulées, reflétant la précarité  de la situation. Le divan moelleux où se vautraient la vanité et l'insignifiance des propos, dans le salon lambrissé, londonien, fut à l'image cotonneuse des philosophes de boudoir, sirotant le "five o'clock tea".

La réussite des contempteurs fut partielle : elle s'avéra néanmoins car les coups portés à KRISHNAMURTI ne s'arrêtèrent point. Ils continuèrent jusqu'à sa mort ; l'oubli est ensuite venu investir le carreau d'une mine... d’argent que les marchands du temple persistèrent à exploiter, quelque temps.

Écoutons ces protagonistes, inconnus, qui nous laissent un goût amer, déjà connu, de fossoyeurs de la pensée et du sentiment.

La postérité jugera.



"Les très grandes questions sont celles sur quoi le premier venu n'a,
pas plus qu'un autre, chance de déraisonner".


Jean ROSTAND

"Quand un Homme parle à un autre Homme, qui ne le comprend pas,
et que le premier qui parle ne comprend plus, c'est de la métaphysique".


VOLTAIRE

CONTROVERSE ET SOPHISMES

"Le Star Bulletin! Je le lis aussi moi-même... Malgré cela, comme vous voyez, ajouta-t-il en souriant, je crois toujours aux Maîtres !"

Le "Star Bulletin" fut un journal, créé à l’époque de la dissolution de l'Ordre de l'Étoile d'Orient, et dont le but était de publier l'enseignement de KRISHNAMURTI. Pourtant, le message de ce dernier avait été explicite : il ne voulait plus d'école spirituelle créée autour de son nom. Mais il fut trahi, d'emblée ! On voulait traire la « Vache » !

L'interlocuteur confie qu'il considère toujours KRISHNAMURTI comme un Maître. Mais la suite de ses dires va contredire cette proposition, avec un pharisaïsme éhonté.

"Je suis heureux que quelqu'un y croie, remarqua Sir THOMAS, avec une bonhomie ironique. Ah ! Mes amis, si les idées de KRISHNAMURTI étaient universellement admises, plusieurs d'entre nous pourraient tout aussi bien se transporter sur une autre planète".
 
La subtilité est de taille. Le discours signifie que l'interlocuteur se juge, se situe au dessus de KRISHNAMURTI et, en conséquence, il considère que si les autres Hommes l'avaient compris , lui et quelques autres "Initiés" n'auraient plus rien à faire sur la terre car les humains auraient été éclairés. A moins qu’il ne pense autre chose ! En l’occurrence, si le Philosophe avait intoxiqué la planète entière, avec des idées jugées subversives, le problème serait grave à ses yeux et justifierait leur départ ailleurs ! Sur une autre planète ? Cet élément n’est pas sans rappeler  le scandale du meurtre collectif sous la dictature templière de Luc JOURET et Jo DI MEMBRO, lors de quelques décennies passées. Tous les néo templiers devaient partir sur une planète lointaine, Sirius, après la mort !
 
Plus loin les divers intervenants vont discréditer KRISHNAMURTI, se contredisant eux-mêmes, parfois !
 
"Dois-je comprendre, Sir THOMAS, que vous n'approuvez pas entièrement les méthodes de KRISHNAMURTI ?"

Après s'être placés au niveau de KRISHNAMURTI, par une pirouette de rhétorique, les orateurs vont ainsi pouvoir critiquer leur "inférieur"... ! Il y a des prétentions à la hauteur de la bêtise de leurs auteurs. Déjà, les curés se plaçaient au niveau du CHRIST en se permettant, suprême injure, de modifier ses enseignements sous le prétexte de maturation théologique ! En effet, la majorité des Évangiles a été modifiée, exploitée, pour satisfaire l’hégémonie des églises. SIMON de MONTFORT est de toutes les époques.

"Malheureusement, il n'a pas de véritable méthode, depuis qu'il a pris l'initiation d'Arhat et qu'il a cessé d'être le médium du Seigneur MAITREYA . Mieux eût valu, à ce moment-là, qu'il se retirât de la vie publique pour méditer dans la solitude, ainsi que les Arhats des temps anciens".

Ici nous avons le sermon ésotérique, classique, dont la vocation est de plonger l'interlocuteur dans une nébuleuse intellectuelle, à l'aide de mots et formules occultes afin de l'impressionner. Être incompréhensible pour mieux manipuler..., c'est un peu comme pour le docteur KNOCK qui, après avoir demandé à un malade présumé s'il connaissait le latin, et en avoir obtenu une réponse négative, l'abreuva de locutions latines, inintelligibles, pour mieux l'intimider. MOLIÈRE n'est pas mort !

"Je suis un peu dans le vague, au sujet de cette initiation d'Arhat".

"C'est l'initiation au cours de laquelle le Maître retire toute espèce de direction à l'élève, qui peut avoir à résoudre les plus graves problèmes sans être autorisé à poser une seule question, expliqua-t-il. Il doit se fier uniquement à son propre jugement et, s'il commet une erreur, en supporter les conséquences".

"Mais que fit alors KRISHNAMURTI », intervint notre hôte qui avait évidemment saisi cette digression. « Ce qu'a coutume de faire le serviteur qui sait qu'on est sur le point de le congédier, et se hâte de donner lui-même son congé ; en d'autres mots, il rompit tout rapport avec la Loge Blanche et répudia chacun d'entre nous".

Là, l'accusation est de taille. KRISHNAMURTI n'allait pas être congédié puisque tous les disciples le suppliaient de rester leur Guru. Quant à sa rupture avec la Loge Blanche, on aurait pu demander à Monseigneur LEADBEATER si ses pulsions sexuelles, excitées au contact du jeune KRISHNAMURTI, s'intégraient dans le projet spirituel inhérent à l'Arhat.

« Bien malheureusement », ajouta J.M.H., « il induisit à agir de même un certain nombre de gens inférieurs à lui dans le domaine de l'évolution spirituelle. De plus, au lieu de diffuser la Doctrine Nouvelle dont le monde avait un si immense besoin, il échappa aux responsabilités de sa mission de Prophète et de Maître, en revenant, spirituellement parlant, à une incarnation passée, c'est à dire à cette ancienne philosophie de sa race qui vous est familière, mais qui s'avère tout à fait inutile, dans le présent Cycle et pour le Monde Occidental".

KRISHNAMURTI se refusa à employer un langage dichotomique à l'égard des personnes. Jamais il supposa qu'il y avait des gens inférieurs aux autres, sur le plan spirituel. La parabole de la pyramide avec ses versants complémentaires qui mènent tous à son sommet, ne devait pas lui être inconnue. La tradition est une en son essence et multiple en ses aspects ; l'Homme aussi.
  
Mais la réaction pharisaïque de ces personnages traduit une connotation avec une certaine religion qui prône, et nous citons :

« Jésus était Vrai Homme et Vrai Dieu ».
 
Ce qui revient à dire que l’Homme ordinaire n’est pas Vrai Homme et encore moins Vrai Dieu. Le "vulgum pecus" est relégué au rang de « sous Homme ». Par conséquent, en plus du péché originel, l’Homme « ordinaire » est encore plus enfoncé au rang de « merde », voire de « sous merde » ! Et, avec ce genre de discours, les religions continuent d’exister ! Et les contestataires de KRISHNAMURTI de sévir !

"Alors nous avions donc raison », m'exclamai-je, c'est bien la philosophie de l'Advaïta" ? Il me fit signe que oui.

"Cependant le public, auquel il s'adresse, s'imagine qu'il reçoit un Message nouveau et, comme tel, ce Message l'impressionne trop fortement », dit à son tour Sir THOMAS. « Le message que KRISHNAMURTI devait apporter, il ne l'a pas délivré, ou n'en a délivré qu'une partie : rien qui touche à l'art, nul plan concernant la nouvelle sous-race, nul programme éducatif. En lieu et place de tout cela, l'Advaïta, une philosophie pour chélas et l'une des voies de Libération les plus fréquemment mécomprises".

Plus tard, KRISHNAMURTI écrivit de nombreux ouvrages sur l'éducation et la culture. Son principe du libre progrès avait trouvé un écho retentissant auprès d'un autre Sage : SRI AUROBINDO qui édifia une École du même nom à Pondichéry, ancien comptoir français (Indes).

La lecture du discours de dissolution de l'Ordre de l'Étoile convainc tout un chacun que l'enseignement de KRISHNAMURTI est d'une densité universelle qui dépasse toute doctrine académique, fusse l'Advaïta !

"Faut-il donc admettre », hasardai-je, « que la mission de KRISHNAMURTI est une faillite totale " ?

"Ami », dit le vieux gentleman, « vous posez beaucoup de questions... Quel usage ferez-vous de nos réponses, si nous vous contentons ?»

"Sir THOMAS », répliquai-je, « à cause de KRISHNAMURTI bon nombre de gens sont dans une grande détresse : si vous vouliez être assez aimable pour m'éclairer un peu sur ce sujet, je serais peut-être à même de les éclairer, eux".

Il est un axiome qui veut que, pour se convaincre soi-même, à la suite d'un doute, il suffit de faire du prosélytisme. L'adhésion des autres à la théorie, objet de notre doute, nous persuade de notre erreur à ne pas croire en elle ; elle reconvertit. Les Théologiens ne manquèrent pas d'appliquer ce principe à l'égard des séminaristes tièdes en matière de foi, à l’instar des Popes de l’Église orthodoxe sous les Tsars de la vieille Russie ; ils les envoyaient évangéliser. Ceux-ci revenaient, complètement fanatisés car, pour convaincre autrui, il faut soi-même être convaincu. Le menteur, qui veut persuader, doit croire lui-même en son propre mensonge pour en faire une vérité ! Tout un programme.

L'interlocuteur de Sir THOMAS s'empresse de proposer son énergie pour faire du prosélytisme ; il espère, ainsi, lever les derniers doutes qui l'habitent, en s'investissant d'une mission d'enseignement... Plus ou moins consciemment !

"Bon », s'écria-t-il, « le mobile est pur ; il sera répondu à vos questions".

Évidemment, il ne peut pas en être autrement eu égard à la propagande de l'Organisation. Par ailleurs, en partant du principe de départ que la pureté habite l'auditeur, celle-ci lui est imposée par une suggestion irrésistible et selon des critères qui apparaîtront de plus en plus, au fil de l'entretien. L'auditeur est donc forcé d'obéir aux idées reçues auprès des intervenants autorisés, pour mériter... sa pureté, et leur reconnaissance.

Par conséquent, et selon la volonté des « contempteurs »,  les explications qui vont suivre seront à prendre au premier degré, comme paroles d'évangile et « orbi et orbi ». Autrement, l'auditeur ne sera plus pur... Évidemment !

Subtil conditionnement psychologique.

"Celui qui, essayant d'enseigner l'Advaïta, néglige de se servir des termes du sanscrit, se condamne déjà, par-là, à l'insuccès. Les mots sanscrits engendrent une vibration occulte qui se perd dans la traduction. Les termes occidentaux ne se prêtent pas à la description d'états de conscience subjectifs, leurs associations d'idées étant, pour la plupart, trop terrestres. » Il se tut un instant pour achever son lunch, puis ajouta : "Mon frère KOUT HOUMI a très justement dit que KRISHNAMURTI avait détruit les nombreux escaliers qui menaient à DIEU, tandis que le sien propre demeurait incomplet"...

La manipulation intellectuelle va jusqu'à inventer une relation privilégiée avec un être miraculeux, proposé existant, KOUT HOUMI, dont on sait la nature mythique. Aucun escalier ne mène à DIEU puisque la Réalisation du SOI n'a aucun chemin. Si elle en avait eu un, on l'aurait su et l'humanité connaîtrait un autre destin ; tous les Êtres vivants aussi. Quant aux vibrations sonores inhérentes au sanscrit, elles relèvent d'une science mathématique dite des mantras . Elles n'ont donc rien à voir avec un texte profane.

"Et il ne saurait nullement convenir à tous les types d'âmes humaines », ajouta mon Maître.

Après avoir affirmé, péremptoirement, que le chemin de KRISHNAMURTI était incomplet, l'orateur condamne sa vocation universelle.

"... donc incomplet », reprit Sir THOMAS, « suivant son idée, et ceci peut conduire ceux qui tentent de le gravir à des dangers inattendus. Danger numéro un : KRISHNAMURTI, ayant rejeté des définitions et classifications consacrées par le Temps, laisse ceux qui aspirent à la vie spirituelle sans aucune véritable échelle de valeurs. Danger numéro deux : gravir un chemin personnel nécessite une méditation presque constante, laquelle à son tour exige la constante protection d'un Guru. Or, le Guru n'est pas admis par KRISHNAMURTI », conclut-il, avec un malicieux clin d'œil.

La supposition que le chemin, emprunté par KRISHNAMURTI, est incomplet reste une formulation subjective qui, de ce fait, n'engage que la responsabilité de son auteur. Il s'agit d'une usurpation de compétence, appuyée hypocritement sur le fait d'en parler. Pas plus que discuter de DIEU ne rend compétent à cet égard.

Par ailleurs, la démarche de KRISHNAMURTI ne constitue pas un chemin particulier ; de par son universalité libératrice de tout dogme, elle ne s'avère que par son adaptation individuelle, en dehors de tout système, de toute tradition.

Le mot "danger" frappe l'imagination et réveille des peurs ancestrales. Une dimension sacrée est donnée au temps qui pérennise les traditions.  L'humanité est en marche et chaque étape de son évolution n'est que le moment historique, éphémère, de son passage terrestre ; après la bougie il y eut l'électricité, puis le nucléaire et l'informatique, la manipulation génétique. Demain ?

La quête de l'Homme est tendue vers un perpétuel devenir, sans nom ni chemin. Il n'y a donc pas besoin de Guru. Sauf, éventuellement et à l'image d'un catalyseur, la présence d'un Ami qui Éveille. KRISHNAMURTI en fut un.

"Mais », demandai-je, « la protection d'un Guru est-elle toujours nécessaire pour la méditation, je veux dire lorsqu'elle est pratiquée à petites doses ?»

A partir de quel moment la méditation n'est plus à petites doses ? Là aussi, la subjectivité voue au néant l'argutie de l'orateur.

"Naturellement, un degré modéré de méditation peut se pratiquer en toute sécurité sans Guru », répliqua MOREWARD HAIG. « Comme le dit Sir THOMAS, la méditation longuement prolongée mène à certains états de conscience et à des évasions sur d'autres plans qui rendent la direction d'un Maître absolument indispensable. Un autre défaut de ce pseudo Advaïta que prêche KRISHNAMURTI, c'est qu'il s'adresse à la personnalité (à l'Homme sur le plan physique) tout comme s'il était la monade ou, du moins, l'Ego. Sans doute que la Monade est la divine Étincelle, l'Existence, la Connaissance et la Félicité absolue ; par conséquent, elle est éternellement libre mais il ne s'ensuit pas que la personnalité, vivant ici-bas sous l'oppression de difficultés karmiques qui semblent ne devoir jamais finir, soit à même de partager cette Conscience absolue de la monade, ni même celle de l'Ego, qui constitue le lien entre la personnalité et la Monade. L'Advaïtisme de KRISHNAMURTI, qu'il ne faut pas confondre avec la forme reconnue de cette noble philosophie, ne peut, je le crains, mener ses adeptes nulle part, si ce n'est, peut-être, à l'hypocrisie et au manque de sincérité envers soi-même".

La méditation peut amener certains états comme l'apnée, ou bien l'arrêt cardiaque. Mais ces symptômes sont réversibles, naturellement. L'essentiel, en la circonstance, reste de suivre un régime végétarien, strict, selon la règle d'hygiène en la matière.

Le moi des passions est périssable. Il est le moule de la conscience, néanmoins ; sa forge au sein de l'existence. Les théories initiatiques s'adressent à l'Homme en sa globalité. Elles ne sauraient concerner le SOI (la Monade) dont l'accès ne possède aucun chemin... En regard d'un aimant, par exemple, le centre est neutre, jamais atteint que virtuellement. Si l'on coupe un aimant en deux, il y aura dédoublement et non partage. On ne peut pas séparer les deux pôles, ni isoler le centre. Si nous donnons le nom SOI aux centres des aimants, alors l'image de la Monade (le SOI) inaccessible, s'avère.

Le discours de KRISHNAMURTI s'adresse à l'être tout entier, considéré comme la matière première et son propre alchimiste, à la fois. Évacuant l'idée d'un intermédiaire, Guru, il ne retient que le catalyseur de la conscience.

« Et », approuva Sir THOMAS, « après les avoir incités à répudier tous les Maîtres, il se refuse, lui-même, à être leur Guru. Des enfants criant dans l'angoisse de la nuit spirituelle, et personne pour les réconforter. Celui qui pourrait leur venir en aide s'y refuse et nous, qui voudrions les secourir, nous sommes impuissants, car le Doute a empoisonné leur croyance en notre existence même. Rien d'étonnant que le visage de KOUT HOUMI soit un peu triste ! »

KRISHNAMURTI est honnête avec lui-même ; il ne sera pas le Guru de quiconque. Sa cohérence n'aura comme écho que son contraire chez ses détracteurs. L'angoisse existentielle est le propre de tous les Êtres. De nos jours, la médecine essaye d'y remédier à l'aide de tranquillisants et neuroleptiques. Certes, les somnifères de la religion ont vécu. Mais...

"Le lot des humains est de naître, vivre, procréer et mourir. Tant que l'on se contente de ce mode vie, tout va à peu prés bien. Mais dès que l'on se pose des questions sur le pourquoi des choses et de l'existence, alors advient l'angoisse existentielle et son cortège de maux. On découvre que la vie est comme un pendule qui oscille entre l'ennui et la souffrance ".

SCHOPENHAUER

« Je viens de chez moi. Je suis moi. Je retourne chez moi. »
 
Pierre DAC
 

"Que puis-je savoir ? Que dois-je faire ? Que m'est-il permis d'espérer ?»

KANT

  
Aucune aide extérieure ne peut valablement résoudre la problématique de l'existence. Même, et surtout pas, KOUT HOUMI le personnage irréel de la légende.

Sir THOMAS se tourna vers son grand chien, le caressa et l'interpella : « Mon bon ami, si le Roi lui-même te disait que ton Maître t'est inutile, je suis sûr que tu ne le croirais point, hein ! »

Le chien est un animal à qui l'on a imposé la domestication et la tutelle. A l'origine, il a pu être loup ou chacal ; totalement libre. L'Homme n'était pas son Maître ; il devint son despote, son tyran qui le réduisit en esclavage pour s'en servir à l'instar des autres animaux de la planète, servables et corvéables à merci.

"Me pardonnerez-vous », dis-je à mon hôte, « si je reviens au sujet dont nous discutions ? »

"Quoi ? Encore des questions », répliqua-t-il avec une feinte sévérité ; « vous nous présenterez sous peu un dictionnaire. Eh bien, allez-y ! »

"Vous vous rappelez peut-être que je vous ai demandé si la mission de KRISHNAMURTI devait être considérée comme un complet échec " ?

"C'est juste. On peut dire qu'elle fut une réussite tant qu'il fut adombré par le Maître du Monde, mais plus tard, une faillite. Il fit de bon travail en enseignant aux gens à user de leur propre jugement et en leur faisant comprendre » (silence).

Là encore, on accuse KRISHNAMURTI de n'avoir pas obéi au Maître du Monde (Lequel ? Où ? ...).

Un tel Maître mondial devait posséder de piètres moyens pour diriger la planète si l'on retient l'histoire et l'exégèse.

"KRISHNAMURTI est venu pour briser le vieil ordre des choses, en prévision de l'ordre nouveau. Mais il a démoli beaucoup trop d'éléments du passé et il n'a rien préparé pour l'avenir . Néanmoins l'ordre ancien n'est plus et ne saurait être ressuscité. Le temps de l'aveugle obéissance à des chefs est également passé. Le salut ne saurait être obtenu par le seul culte rendu à des personnalités dont on accueille chacune des paroles comme un évangile ; car accepter n'est pas nécessairement comprendre. Même un Être aussi grand que BOUDDHA disait : « Ne croyez jamais une chose simplement parce que je vous la dis" !

Une concession est faite à KRISHNAMURTI, néanmoins, mais de manière indirecte. On reconnaît, implicitement, que le changement est la seule constante dans la vie planétaire. Mieux même, un coup de patte est donné à l'instinct grégaire par la dénonciation du rôle de chef, en matière de spiritualité. La royauté naquit du grégarisme qui dégage un dirigeant, par nécessité sociale.

La spiritualité s'adresse au SOI qui réside dans le plus grand secret de l'être. Et, là, aucun chef ne peut rien...

"On peut définir KRISHNAMURTI comme un précurseur dont ce Cycle particulier avait besoin, mais non pas comme le Maître du Monde. » Sir THOMAS ajouta : « Nous n'attendons pas le Maître du Monde avant la fin de ce siècle".

La concession à l'œuvre de KRISHNAMURTI, continue. Mais on s'empresse de préciser qu'il n'est que lui-même. Le meilleur et le plus grand hommage... Car, être soi-même n'est pas à la portée de n'importe qui !

"Mais pourquoi, même un précurseur..." ?

"Qui peut s'arroger le droit de juger quelqu'un sans connaître ses difficultés », interrompit Sir THOMAS ? « Toute qualité a forcément son revers. Ai-je besoin de vous demander si vous avez entendu PARSIFAL ? Non, car vous aimez, comme moi, passionnément la musique. KRISHNAMURTI a la noble simplicité d'un PARSIFAL : ayant atteint, lui-même, un certain état de conscience et d'évolution, il ne sait pas voir, dans sa modestie, que les autres sont très loin d'y être parvenus . C'est pourquoi il leur prescrit ce qui ne convient qu'à lui-même".

A l'audition de cette considération, on est en droit de s'interroger ; l'orateur condamne le jugement proféré à l'encontre de KRISHNAMURTI, alors qu'il vient de le juger, auparavant. Le pharisaïsme est de taille ; complètement éhonté. A moins que...

A moins que, pour clore le monologue, l'orateur agisse de façon à faire taire, par une objection préalable, toute tentative de péroraison future qui échapperait à son contrôle. Autrement dit, KRISHNAMURTI a été critiqué et apprécié par des "Maîtres" (sic) qui sont, seuls, compétents à cet égard. Les autres personnes qui oseraient prendre la relève, n'apprécieraient pas, aux yeux de ces mêmes "Maîtres" ; ils jugeraient...! Donc ils seraient condamnables.

Quelle admirable manière de clore les bouches !

PASCAL avait déjà anticipé sur KRISHNAMURTI et les pseudo Maîtres londoniens auraient mérité de le connaître ; car :

"En savoir plus long n'est pas en savoir plus, connaître le tout de la réponse. Or, on ne connaît le tout de la réponse quand il n'y a plus de question, mais cela n'arrive jamais car toute réponse soulève de nouvelles questions, sans parler du fait qu'il y a aussi entre les réponses un état de guerre qui fait que les unes s'opposent aux autres et personne ne peut trancher".

Dont acte !

jeudi 18 août 2011

Le discours de KRISHNAMURTI (Le déconditionnement, clef de la vie) - 2° partie



LE DÉCONDITIONNEMENT, CLEF DE LA VIE
 
"Dans ses faux embrassements, la courtisane est comme le mercenaire
qui serre un mort entre ses bras pour l'ensevelir".
      
KOURAL
  
La dissolution de l'Ordre de l'Étoile d’Orient pouvait s'appliquer à n'importe quelle organisation de la pensée et du sentiment, qu'elle fut religion, politique, philosophie, ésotérisme, initiation. Sa portée dépassa l'événement historique qui lui servit de prétexte ; car l'œuvre fut d'une dimension exponentielle. A travers KRISHNAMURTI, ce fut la liberté et la libération de l'Homme de tous les carcans idéologiques, dogmes et cultures, qui vécurent leurs prémisses.
 
Depuis l'enfance, l'être humain est conditionné par le milieu parental, l'école, la religion dogmatique, l'armée, la police, la politique, la propagande, la culture, la publicité, et cœtera… L'intention est d'inculquer des habitudes de penser, sentir, aimer, manger, se comporter, et cœtera... qui seront des référents pour la vie sociale ; une seconde nature. Se plier aux règles, us et coutumes, les enseigner aux autres, ce sera le moyen de se faire reconnaître par le microcosme social comme un citoyen honnête. La culture est la programmation sociale de l'individu selon les desseins de l'histoire.
 
Les organisations religieuses surent inventer et mettre au point la plus diabolique technique de mise en condition psychique et psychologique, jamais connue. Les méthodes de dépersonnalisation de l'armée s'en sont inspirées (tous doivent marcher au pas et n'avoir qu'une tête...; être sous contrôle, obéir au doigt et à l'oeil). Les partis politiques et  églises se firent de mutuels emprunts en matière de conditionnement mental et comportemental. Pourtant, à l'instar de KRISHNAMURTI, les Hommes savent recouvrer leur liberté quand leur survie en dépend.
 
Tous les Puissants cherchent à standardiser le comportement par l'uniformisation de la pensée et du sentiment. Ils s'appuient sur toutes les organisations idéologiques qui sont susceptibles de les servir dans leurs desseins de programmation psychique et contrôle mental. Ainsi, les États n'hésitent pas à flirter avec les grandes Religions institutionnalisées quand cela leur est utile, bien que, pour certains, la laïcité soit inscrite dans leurs Constitutions gouvernementales. Endormir la pensée en garnissant l'estomac, fournir des jeux guerriers et publier des émissions télévisées sur l'ordre policier, salvateur, est au programme des psychologues et spécialistes des mentalités. Quant à la justice, juste, c'est à dire celle qui sert l'éveil de la conscience et non pas l'ordre absolu exigé par les diplomates et autres prédateurs sociaux, la vocation des systèmes politiques n'est pas de l'honorer.
 
Les religions actuelles sont des sectes , au sens étymologique du terme. Elles ont vocation à hypnotiser les foules de par le fait même qu'elles enseignent des dogmes ; la politique, qui n’est qu’une guerre non sanglante (la guerre étant une politique sanglante), aussi.
 
En ce contexte, KRISHNAMURTI fit figure de précurseur de la libération individuelle qui doit être résolue par chacun, pour soi-même. Car, en l'occurrence, une organisation possédant un but spirituel est une incongruité. La liberté est intérieure, d'abord. L'amour et la connaissance sont le moteur positif pour la vie sociale.
 
En vertu de ces constats, les applications sont évidentes. Aucun privilège ne se justifie s'il s'interpose entre la Vérité objective et soi-même. Autrement la cristallisation du savoir devient fossilisation et aboutit à la formation d'un nouveau culte. Aucune autorité absolue n'est donc justifiable, à posteriori. Mais, alors, par quoi doit-on remplacer la lettre, si l'esprit en est absent ? La liberté, toute nue, est-elle supportable ? Pour tous !
 
Ces problèmes, nouveaux dans la mesure où ils apparaissaient en pleine actualité avec KRISHNAMURTI, ne furent pas considérés comme innocents par ceux qui, sous l'autorité d'un autre, l'avaient autrefois accepté comme Instructeur. Car leurs piédestaux s'ébranlaient et ils allaient chuter avec les illusions lavées par le torrent de la réalité. Mais, certains se rassurèrent car ils savaient, aussi, que la plupart des gens allaient continuer dans le contentement des mots et grandes idées, non réalisées comme auparavant. La nature de l'Homme est ainsi !
 
La croyance est un abri pour les faibles, qui les protège de la liberté. Certes, d'aucuns pourront se révolter à cette idée, arguant qu'ils sont libres de croire ou ne pas croire. Pourtant, cette formule elle-même prouve que, là encore, il s'agit d'un acte de foi car elle s'articule toujours autour du mot "croire" ; cette ellipse s'apparente à la question piège du camelot: "Voulez-vous 100 kilos de patates ou 25 kilos", demande-t-il à un client manipulé, alors que celui-ci n'en veut pas du tout mais, afin de se libérer de l'agression, accepte lâchement d'en prendre 25 kilos dont il n'a que faire ! Le fait de ne vouloir pas croire est encore une forme de croyance ; en effet, la science repose sur l'observable et la reconnaissance des lois naturelles dont l'approche est, d'abord, subjective.
 
Les anciens Hommes avaient observé que le soleil se lève à l'est et se couche à l'ouest ; mais ils ne savaient encore pas qu'il s'agissait d'une illusion car les moyens astronomiques de la découverte leur échappaient. Les primitifs commirent l'erreur de prendre une apparence pour la réalité finie. Incapables d'aller plus loin, certains transformèrent cette croyance en religion. Au fil des millénaires, les religions solaires furent créées sur la base d'une vérité subjective, erreur scientifique. Pire même, la projection de la subjectivité et de ses fantasmes, sur la réalité, déforma l'appréhension objective des faits, comme à travers un prisme et engendra un sur-moi collectif, répressif et intolérant. Le résultat fut la dogmatique qui aboutit à l'assassinat des incroyants. Même l'Église catholique et romaine n'y échappa point ; elle condamna GALILÉE et Giordano BRUNO pour des raisons identiques.

Nos aïeux ne voyaient jadis, dans l'univers, que des clous d'or qui parsemaient la voûte bleue du firmament. Aux yeux des plus savants théologiens, la terre n'était pas seulement un monde, elle était le monde et ce monde était plat au lieu d'être rond ; il était immobile au lieu de rouler dans l'espace. A une certaine profondeur, on plaçait l'enfer, éternel séjour des réprouvés et des démons ; au-dessus, la sphère des éléments où le feu succède à l'air ; puis les sphères de Mercure, de Vénus, du Soleil, de Mars, de Jupiter et enfin de Saturne, septième et dernière planète qui jouissait d'une assez mauvaise réputation. Plus haut, on voyait le firmament solide où étaient attachées les étoiles fixes ; puis le merveilleux neuvième ciel, le premier mobile ou cristallin et enfin l'empirée, séjour des bienheureux.
 
Cet ingénieux système fut enseigné explicitement dans la Somme Théologique de Saint THOMAS d'AQUIN, et servit de base aux décisions de plusieurs conciles. Aux yeux des plus fameux docteurs, le soleil n'était qu'un flambeau placé dans quelque coin de l'espace, pour éclairer notre petit monde, en se promenant tout autour. On comprenait dés lors facilement que Josué l'eut arrêté quelques heures pour achever le massacre des Gabaonites. La terre était censée reposer sur quelque fondement fixe, et ne pouvait être habitée qu'à la surface, d'en haut. Celle d'en bas était inconnue, et si quelque esprit téméraire s'avisait de soupçonner les antipodes, on lui demandait en haussant les épaules, comment des Hommes pouvaient vivre la tête en bas.
 
LACTENCE, dont son "Traité de la fausse sagesse", gourmande ainsi les insensés qui osent prétendre que la terre pourrait bien être ronde :
   
 « Que dirons-nous de ceux qui croient aux antipodes et mettent des êtres contre nos pieds ? Peut-on être assez inepte pour croire qu'il y a des Hommes dont les pieds sont plus hauts que la tête ? Des pays où tout est renversé, où les fruits pendent en haut, où les cimes des arbres tombent en bas ? Que les pluies, les neiges et la grêle tombent de bas en haut ? N'admirons plus les jardins suspendus et ne les mettons plus au nombre des sept merveilles, car voici des philosophes qui suspendent dans les airs les champs et les mers, les villes et les montagnes. On trouve les germes de cette erreur chez ceux qui osent prétendre que la terre est ronde ».
 
Cependant, en dépit de LACTENCE et d'autres docteurs de sa force, COPERNIC et GALILÉE démontrèrent, jusqu'à l'évidence, l'absurdité du vieux système astronomique. La science, armée du télescope, fit voler en éclats le fameux cristallin et ouvrit une magnifique trouée sur l'infini. Grâce à ses découvertes et à ses calculs incontestables la terre, au lieu d'être le monde, n'est plus qu'un petit astre tournant avec une vitesse vertigineuse autour du soleil, et les planètes, ses sœurs, ne sont plus que les terres du ciel ! Foudroyé et ravi, saisi d'un rire divin, GALILÉE communiqua au monde sa découverte ou plutôt sa vision par le « Messager des étoiles ». Sa révélation fut comme la bible de la lumière, le ravissement de la certitude, le fait supprimant le doute. DIEU se trouvait élargi en même temps que son œuvre. KEPLER, au nom du genre humain, salua le Christophe COLOMB des cieux.
 
Cette conception nouvelle de l'univers devait bouleverser de fond en comble la vieille théologie et Rome le comprit. De là le procès fameux intenté par l'Inquisition à l'illustre astronome de Florence. Quoi qu'on en ait dit, ce n'était pas la personne de GALILÉE qui était en cause, mais sa découverte. La raison profonde qui le fit condamner est la même qui mit BACON, COPERNIC, DESCARTES à l'index ; celle qui fit brûler Giordano BRUNO "pour l'hérésie de la nouvelle science du monde". Malgré toutes les précautions qu'il prit pour ne point effaroucher le Saint Office, l'illustre vieillard GALILÉE dut comparaître devant une commission de huit cardinaux, présidée par le Pape URBAIN VIII. Il se vit contraint de se mettre à genoux et de prononcer la formule suivante :
  
 "Moi, Galilée, dans la soixante dixième année de mon âge, étant constitué prisonnier et à genoux devant vos Éminences, ayant devant les yeux les saints évangiles que je touche de mes propres mains, j'abjure, je maudis et déteste l'erreur et l'hérésie du mouvement de la terre".
 
Qui pourra comprendre et raconter les angoisses intimes du génie qui prononçait de telles paroles ? Rentré dans sa cellule, GALILÉE eut un moment de colère sublime. Frappant du pied le plancher de sa chambre, il s'écria : "E pur se muove" (et pourtant elle tourne).
 
Oh ! Oui, la terre continuait de tourner, malgré les cardinaux et tous les Théologiens, qu'elle emportait dans sa course vertigineuse. GALILÉE fut condamné à la prison perpétuelle et ses œuvres furent mises à l'index. Elles y restèrent encore, jusqu'à l'an 1993, pendant que le savant P. SECCHI enseignait son système à Rome, avec l'assentiment du successeur de l'infaillible URBAIN VIII. La papauté, par ce procès mémorable, se créa bien des embarras, mais elle se montra perspicace. Elle sentait qu'une grande question allait surgir, et cette question, la voici :
 
"D'un côté est le livre des canons ecclésiastiques et des décrets du saint Siège, de l'autre est le livre de l'univers et des lois éternelles de la géométrie. Ces deux livres se repoussent et se contredisent. Lequel des deux devra céder à l'autre ? Sera-ce le livre des Papes ou celui de la science ? Le livre sacré devra-t-il s'incliner devant le fait immense constaté par le télescope ou bien le fait devra-t-il reculer devant le texte interprété par une autorité qui se prétend infaillible ? Question formidable qui a dû hanter comme un cauchemar l'esprit des vieux docteurs. L'astronomie devenait fort gênante comme devaient bientôt le devenir la géologie et l'histoire. Des doutes s'élèveraient sur la Genèse, l'Apocalypse ; l'économie du verbe incarné pouvait donner lieu à des discussions dangereuses. On se demanderait avec une curiosité malsaine où sont l'enfer, le purgatoire, la céleste Jérusalem si bien décrite par l'aigle de Pathmos ? Et qui sait ? Peut-être qu'un jour des esprits audacieux, à force de contempler les étoiles, pourraient conclure de la pluralité des mondes qui roulent dans l'espace, à la multiplicité des planètes habitées, pour proclamer ensuite le grand dogme scientifique de la vie progressive, ou de la pluralité des existences de l'âme, la réincarnation".
 
Mais, dans toutes les religions du monde, s'il y a un DIEU pour les ivrognes, il n'y en a pas pour les innocents !
 
La foi, la croyance, peuvent donc devenir meurtrières.
 
De nos jours, la foi en l'éventualité de tel ou tel fait, de telle ou telle réalité ou loi naturelle, n'est plus qu'un élément subjectif de départ dans la recherche fondamentale. Les résultats viendront infirmer, modifier ou confirmer le postulat d'origine. Mais, jamais, un esprit rationnel ne prendra une croyance pour la réalité finale.
 
Les croyances sont donc anti scientifiques, contraires à la raison ; elle sont une insulte à l'intelligence et une atteinte à la liberté quand elles ont vocation d’hégémonie mondiale. La foi  n’est qu’affaire personnelle et intime ; par conséquent les croyances ne doivent pas être l’objet de prosélytisme, propagande et d’évangélisation qui ne sont que des viols de la conscience individuelle.

Les preuves sont partout. Aucun « credo » n'a jamais été valable ontologiquement pour transformer la conscience profonde de ceux qui la professaient ; ils sont restés tout aussi médiocres ou indigents qu'auparavant. Aucune organisation ne créa de grands Hommes mais, plutôt, certains Hommes furent grands malgré tous les systèmes de pensée. Leur mérite fut d'autant plus fort qu'ils eurent, non seulement à lutter contre leur propre ignorance mais, aussi, contre des organismes qui voulaient les exploiter pour leur bien !
 
Le propre des organisations de la pensée et du sentiment est la promotion des idées de quelques-uns au détriment des autres. C'est la guerre pour la suprématie de la parole afin de convaincre autrui de sa propre supériorité ; que le meilleur gagne ? Non, ce sont presque toujours les pires qui ont le succès, et pour cause. Comprenne qui pourra ! Ce climat ressemble plus à une bataille commerciale pour la suprématie sur un marché... des dogmes, qu'à une démarche philanthropique, voire spirituelle, devant apporter une aide globale à l'Humanité et au Vivant.

L'exemple est de partout. On aime les Animaux pour les manger ; comme on aime les Humains pour les exploiter ! Alors on leur offre des abris idéologiques qui les protègent contre l'orage salvateur, qui secouerait le monde mais ne viendra pas pour les faibles et indifférents. L'orage doit venir, il viendra, mais à travers des individus et jamais par des organisations. Ce sera ce constat d'hyper lucidité qui motivera KRISHNAMURTI, sa vie durant.
 
KRISHNAMURTI insistait sur une réalité primordiale : afin de parvenir à l'harmonie de la paix intérieure et nous orienter vers la libération, il nous faut abandonner ce qui n'est pas essentiel. Aucune organisation ne détient la Vérité ni ne peut nous mener vers elle ; ni les évangiles, ni le coran, la bagawaat gîta, ni aucun texte sacré ou politique, non plus. Leurs auteurs ne sont que des Hommes, empêtrés dans leurs limites et limitations, comme tout un chacun en ce monde. Une pyramide possède plusieurs inclinaisons menant vers le sommet ; tant que quiconque en emprunte une seule, il peut croire en sa valeur quasi absolue et, s’il est un fanatique borné, meurtrier, son intolérance le portera, soit à faire du prosélytisme, soit à détruire toute idée contraire à la sienne. S’il comprend que tous les pans conduisent au sommet, la Vérité, dès lors il navigue de pentes en pentes en ne s’identifiant à aucune. L’Essentiel est de monter vers la Lumière.
 
La Vérité ne peut être contenue, ni par un système, ni par un être humain ou bien quelque extra terrestre, supposé. Car il existe toujours une Vérité supérieure à celle du moment historique d'une civilisation, d'un cycle, d'un être vivant, d'un fait. L'exemple de l'eau chaude et froide est probant en la matière.
  
Si nous prenons de l'eau à 12° degrés et, à côté, de l'eau à 13°, l'une sera froide et l'autre chaude. Mais, si nous plaçons de l'eau à 14° ce sera celle-ci qui deviendra chaude et les précédentes deviendront froides. Derrière des Vérités objectives se cachent des Vérités subjectives et, à l'infini. L'Homme, comme l'animal et la plante, peut-il créer un environnement purement subjectif, à travers l'imagerie limitée de ses 5 sens ?
   
Pour la fourmi, un arbre n'est probablement qu'un univers de vallées et montagnes, animé de sourdes vibrations internes. La dimension totale du végétal lui échappe. Un animal plus élaboré verra l'arbre selon d'autres dimensions. Pour un Homme primitif, un aérolithe n'était qu'une punition divine ; aujourd'hui, le DIEU des Hommes n'a rien à voir avec la chute d'un météorite. Il faudra arriver, tout de même, à l'abolition de l'idée du fantastique dans la réalité.
 
Le déconditionnement culturel est la clef de la liberté car il permet l'ouverture de l'être vers la Vérité, qui n'est pas un acquis mais, au contraire, le fruit du dépouillement des pseudo certitudes et convictions. Elle est l'état d'une conscience totalement éveillée et achevée dans l'intuition de son exponentialité dont la projection, sur le monde, est seule salvatrice.