jeudi 24 novembre 2011

Les plantes dans le chamanisme (4° partie)

Lophophora Williamsii Lem - Peyotl


CACTÉES


PEYOTL

C'est un petit cactus sans épines, de couleur vert cendré, poussant sur les hauts plateaux mexicains et qui se vend chez les apothicaires de la région sous le nom de "Peyotl Buttons" ou "Mescal Buttons" (tranches de Peyotl, coupées dans le bulbe extérieur, puis séchées). Son nom scientifique est Echinocactus Williamsii Lem; il appartient à la famille des Cactacées, tribu des Echinocactées, genre Echinocactus, sous-genre Lophophora Williamsii Lem. Les types différents de PEYOTL n'appartiennent qu'à une espèce unique, dont le facile polymorphisme a pu faire croire à des espèces séparées .

D'après Alexandre ROUHIER (docteur en médecine), auteur d'un excellent livre sur cette plante (confer: "Le PEYOTL, la plante qui fait les yeux émerveillés" - Éditions Guy TREDANIEL - 1975):

"Le sens étymologique du mot PEYOTL est assez confus. Son origine semble être nettement aztèque. Il pourrait dériver du terme nahuatl PEYUTL, dont le sens élastique et imprécis désigne quelque chose de blanc, de brillant, de soyeux, de laineux et qui s'applique à un cocon de ver, à une toile d'araignée, à un fin tissu et même au péricarde".

Cette cactée est originaire du Mexique et de l'extrême sud de l'Amérique, où sa croissance est spontanée; particulièrement sur la haute steppe, désertique. Privilégiant les collines pierreuses et les pentes dénudées des montagnes, le PEYOTL recherche l'abondance de la rosée. Préférant les terrains de nature calcaire il pousse isolé ou bien en famille de nombreux individus. Son aire de végétation se limite au plateau mexicain. Ses bornes naturelles sont:

- Au nord, la vallée du Rio Grande del Norte

- A l'est, la chaîne des montagnes du Tamaulipas

- Au sud, la ligne hydrographique des sources des affluents de droite du Rio Grande de Santiago et de celles du Rio de Mezquital

- A l'ouest, la partie la plus basse du versant oriental formé par la Sierra Madre, la Sierra du Durango et la Sierra del Nayarit.

Le PEYOTL possède la propriété de transformer, dans le psychisme humain, les sons en couleurs. Ingéré cru, il produit des visions colorées sans ôter en rien la conscience de l'expérimentateur. De plus il procure des visions divinatoires, et les Indiens l'utilisent, notamment, pour démasquer les voleurs, les épouses volages et prédire l'avenir.

Contrairement à ses homologues, hallucinogènes, le PEYOTL ne produit ni accoutumance, ni nocivité, à doses non excessives. Au début, son absorption provoque la nausée mais, selon les dires des indiens mexicains, après une première expérience, le corps s'habitue et les nausées cessent.

En France, il est classé comme une cactée rare pour collectionneur averti qui peut le trouver dans les "Cactérium-plantarium" du midi. Son entretien est difficile car il provient des hauts plateaux désertiques du Mexique (2.000 mètres d'altitude) au climat aride, subtropical: chaleur diurne, ardente, suivie d'un intense refroidissement, nocturne. L'année se partage en deux saisons: hiver, saison sèche; été, saison des pluies. Ces dernières, nommées "Aguacéros", se produisent locales et violentes, au cours des mois de juin, juillet, août et septembre. Il ne faut pas beaucoup d'eau au Peyotl, surtout en substrat insuffisamment drainant, autrement les racines pourrissent et il meurt. Cette cactée réclame le soleil, la chaleur naturelle, l'air et la lune, une terre nourricière composée de 1/4 de sable de rivière, grossier, et de 3/4 de compost spécial pour cactées. Normalement, elle ne boit que la rosée ou les pluies fertilisantes, limoneuses, drainant quantités de déchets organiques. Aussi est-il conseillé de vaporiser le Lophophora Williamsii Lem, avec parcimonie, d'un peu d'eau de pluie (ou de l'eau de Volvic; jamais d'eau chlorée, ou bien laisser l'eau javellisée au soleil pendant deux heures au minimum, de manière à éliminer le chlore), tous les trois jours en période chaude, avec des alternances d'arrosage, et pas du tout en période froide (température entre 5° et 10° centigrades - 6 heures d'éclairement, au minimum). En captivité, il convient de lui donner des amendements composés de sang séché et de jus de betterave qui apporteront la trilogie indispensable N.P.K. (azote, phosphore et potasse) plus les oligo éléments sans lesquels toute plante périclite et meurt. En effet, à l'état naturel elle se nourrit de cadavres d'animaux ou d'insectes, et cœtera. En hiver, il convient de la mettre à l'abri du froid, sans la placer sur une source de chaleur pour autant. Si on restitue le cycle des saisons, alors il est possible de la voir fleurir, en France, de juin à septembre, au Mexique de mai à juillet, après la période des grandes pluies, et donner des graines qui pourront germer et donner naissance à d'autres cactus. En effet, elle se reproduit essentiellement par ensemencement naturel de ses graines; mais il est possible d'obtenir de jeunes PEYOTL par bouturage de rejets latéraux. Il suffit de trancher délicatement un rejeton, au rasoir, en lui laissant un morceau de la racine mère; puis laisser cautériser au soleil pendant deux jours, avant de réempoter dans du terreau pour cactées. Autrement la bouture pourrit. Agir de même pour la plante mère qui doit cautériser de la même manière. Agir au printemps, lorsque la sève monte.

Le dépotage annuel est à déconseiller. En effet, le transfert traumatise la plante qui souffre et se met en léthargie plus ou moins longue avant de récupérer ses forces; se considérant en danger de mort, le cactus demeure inerte. Puis, à condition que l'on respecte son sommeil artificiel en ne l'arrosant pas avant une huitaine de jours, le Peyotl se réveille lentement. L'inconvénient majeur du dépotage, outre la perturbation psychique du végétal, est le déracinement qui s'avère blessant ou mutilant; la cactée est donc obligée de restaurer son système radiculaire, opération qui réclame une perte d'énergie, importante. De toutes les manières, le dépotage éventuel devra s'opérer au printemps, selon la règle en la matière. L'idéal est de placer un grand pot contenant la cactée dans un grand bac en terre (bannir les pots en matière plastique qui étouffent les plantes) empli de tourbe; ainsi on arrose uniquement la tourbe avec de l'eau de pluie, et pas du tout le pot de la cactée qui recevra l'humidité requise par capillarité. A ce moment là, la cactée peut fleurir... Le pot devra être enseveli jusqu'à la collerette.

Les graines peuvent mettre près de 21 jours pour germer, semées en terrain convenable. Auparavant elles devront avoir hiverné dans un bocal de verre, ouvert et à l'ombre totale, à une température de 6° à 8°, pour lever l'inhibition hormonale; en effet, pour leur éviter une germination fatale pendant l'hiver, une hormone inhibitrice, spécifique, est sécrétée à la floraison. Cette hormone sera neutralisée durant l'hiver à une température adéquate et, de ce fait, la germination deviendra possible en bonne saison printanière.

Les graines sont minuscules (1 millimètre de diamètre) et, dès qu'elles germent, de la rosée ou des gouttelettes d'eau doivent être présentes; autrement les plantules meurent. La croissance est rapide. Du jour au lendemain, des plantules apparaissent, la nuit passée. Parfois elles sont couchées et on discerne le corps entouré de poils radiculaires, minuscules et en couronne, à la base; dissimulée en leur sein se devine la racine foreuse qui s'empresse de s'enfoncer dans la terre pour assurer la survie de la plante (ne jamais arroser avec de l'eau minérale ou du robinet qui serait mortelle; utiliser de l'eau de pluie ou bien de Volvic).

RÉCAPITULATION

Hivernage

D'octobre à mars pour avoir des fleurs, au printemps; autrement pas de floraison (le 15 octobre les cactées devront être rentrées). C'est une condition "sine qua non" pour toutes les cactées.

Pour le Lophophora Williamsii Lem, le séjour doit être effectué dans un local éclairé par le jour (pas sombre du tout), à l'abri du froid (température entre 5° et 10° centigrades, maximum).

Ne pas arroser depuis novembre et attendre le mois de février pour recommencer, par de brèves vaporisations légères. Ce ne sera qu'à partir de fin mars, début avril, que les cactus pourront être arrosés normalement.

Les cactées hibernent comme les marmottes, en hiver, et il convient de les respecter comme des êtres vivants; ce qu'elles sont de toute évidence.

Semis

Terreau de feuille, mélangé à 30% de sable de rivière, grossier (autrement le sable tasse la terre) - pas de sable de mer.

Mettre ce mélange dans des bacs à germination que l'on trempe dans un autre bac plus grand pour mouiller par capillarité (ne jamais arroser avec de l'eau minérale ou du robinet; utiliser de l'eau de pluie ou bien de Volvic). Autrement, si l'on arrose, on bouscule les graines. Quand l'eau affleure, ôter les bacs.

Les graines sont semées à la volée, puis recouvertes de sable fin sur 1 millimètre; on y ajoute un peu de sable gros pour apporter un peu d'ombre au plantules minuscules qui naîtront. La période faste est le printemps, en tenant compte que les graines doivent germer en phase de "pleine lune"; par conséquent, il faut prévoir les semis à cet effet.

Couvrir les bacs avec du cristal et ne pas soulever tant que la germination n'est pas réalisée (15 à 21 jours). Après la germination, lever le couvercle pour que les champignons ne s'y mettent pas.

Ne pas mettre les plantules sous les rayons solaires, avant six mois; autrement elles meurent, brûlées par le soleil (d'abord elles blanchissent, puis elles deviennent de couleur marron et pourrissent).

Veiller à ce que le substrat reste toujours humide pendant les chaleurs; autrement, les radicelles sèchent et la plantule meurt.

Période

Opérer en mai afin que la température soit d'au moins 25° le jour, d'une part, et qu'elle ne descende pas au-dessous de 20° la nuit, d'autre part. Il est possible de réaliser les semis dès le mois de février, à condition que ce soit à une température de 25°, le jour, dans un local aéré et lumineux, et qu'elle descende jusqu'à 15° la nuit. La variation de température s'impose.

Réempotage

Comme pour tous les napiformes, il convient de repiquer les jeunes plants dans des pots très profonds, et gros; un par 20 centimètres de surface et 30 centimètres de profondeur.

Ajouter à une combinaison de 1/3 de terre de jardin, propre, avec 1/3 de terreau de feuille et 1/3 de sable grossier, 2 cuillers à soupe d'un mélange de sulfate de potasse et de superphosphate de chaux, par litre de terreau, et uniquement en période de végétation (du mois de mars au mois de septembre). Cette méthode est celle des horticulteurs mais elle a le tort de mener les plantes à des difformités et à la maladie. Pour s'en convaincre il suffit d'observer le comportement d'un cactus acheté dans le commerce. Il est plutôt conseillé d'apporter l'azote sous la forme de morceaux de cornaille, mélangés au compost selon les proportions adéquates. Les morceaux d'os sont encore meilleurs car le calcium se transforme en potasse, de manière naturelle, par les micro organismes qui assurent le métabolisme de la plante; à condition, toutefois, que les engrais chimiques ne les aient point tués, auparavant. Il existe aussi un engrais "Osmocote", composé de débris d'os, qui se délite lentement dans la terre selon les besoins de la plante; la dose est de 30 grammes (soit l'équivalent de deux cuillers à soupe) de granules par litre de terreau.

Une fois par mois, arroser avec de l'eau additionnée d'engrais pour géranium (ou bien de sang séché et de jus de betterave - vendu dans le commerce par FERTILIGENE, engrais Solugène, liquide). Là encore, l'engrais organique est encore le meilleur, et ce pour des raisons évidentes.

Le reste du temps, vaporiser et arroser tous les trois jours avec de l'eau de pluie, pendant les grosses chaleurs. L'essentiel est que les racines atteignent un léger dessèchement qui doit rester passager. L'été, lors de la canicule, lorsque la température atteint 40° le cactus arrête sa croissance; il est alors déconseillé de l'arroser sous peine de le faire mourir par décomposition brutale.

Arrêter tout apport d'engrais à partir de la mi-août.

Pour lutter contre la cochenille (parasite destructeur et prolifique), badigeonner les insectes avec un pinceau imbibé d'alcool à brûler, pur. Pulvériser l'ensemble de la plante avec de l'eau additionnée d'alcool à brûler (une cuiller à soupe pour un litre).

Dans la nature, les plantes sont toujours plus robustes car elles s'intègrent dans le cycle universel de la végétation. Chacune a son biotope spécifique, que constituent le climat, la composition du sol et de la terre, la nourriture apportée par les cadavres d'insectes, d'animaux et de végétaux. En captivité, les plantes sont privées de leur milieu naturel et il importe au cultivateur de le leur restituer, autant que faire se peut. Autrement, toutes les plantes meurent; c'est simple!

Conseils

Il est dit que certaines personnes ont la "main verte". Ainsi, la sagesse populaire constate que quelques uns ont du succès dans la culture des plantes de serre, d'autres pas.

La raison en est simple, bien que de découverte récente; les plantes réagissent au psychisme humain et, à l'instar des animaux, elles discernent ceux et celles qui les aiment, des autres qui n'ont que de l'indifférence à leur égard. Elles réagissent à l'amour comme à la haine; prospères dans un sens, elles deviendront chétives et malheureuses, dans l'autre. Certaines meurent, de la haine...

Si l'homme aime les plantes, comme toute la création entière, il sera aimé en retour par elles-mêmes. Les cactées seront heureuses des soins affectueux qu'elles recevront de la main humaine; elles progresseront donc plus vite, plus harmonieusement, et récompenseront l'heureux cultivateur par une abondante floraison, hommage ultime de la plante à la vie!

Il n'y a pas de belles plantes et de vilaines! Ces concepts sont humains; ils n'ont pas de valeur chez les plantes et chacune a son rôle à jouer dans l'écosystème, sur la planète. Ainsi, le Lophophora Williamsii Lem n'est pas "beau", au yeux de quelques personnes; il ressemblerait à un crapaud... Mais un crapaud est beau dans le cadre du règne animal, dans la mesure où il ne manifeste pas une monstruosité morphologique. Les notions de beau et de laid sont d'ordre essentiellement subjectif et, par conséquent, elles n'engagent que la responsabilité de leur auteur.

Les concepts de laideur et de beauté, ne seraient-ils point, en une certaine mesure, la projection subjective de quelques fantasmes sur la réalité? Qui a dit que la beauté était, essentiellement, une lumière intérieure ?

Les humains ne seront que des imbéciles tant qu'ils n'auront rien compris à la nature; à la leur donc. A chacun de changer de nature, dans le sens universel.

Remarques

Les principes actifs sont:

L'Anhalamine - C11 H15 O3 N.
La Mescaline - C11 H17 O3 N.
L'Anhalonine - C12 H15 O3 N.
L'Anhalonidine - C12 H17 O3 N.
La Lophophorine - C13 H17 O3 N.
La Peyotline - C13 H19 O3 N.

Mais la science moderne a détecté 30 alcaloïdes chez le Peyotl (le véritable Lolophora Williamsii Lem), et 8 seulement chez le Lophophora Diffusa ou Lutéa (nouvelles variétés découvertes au Texas) dont les proportions font leur spécificité... L'un, une hormone, a la propriété d'exciter le cerveau droit, dit chamanique. Véritable laboratoire vivant.

Expérience relatée par le docteur Alexandre ROUHIER (confer: Le Peyotl, page 234):

"Le produit employé pour cette expérience est un extrait fluide, Per Os, de mescal buttons, préparé avec de l'alcool à 70° et titrant 2 grammes, 50% d'alcaloïdes totaux.

Age du sujet: 33 ans. Taille: 1 mètre 77. Poids: 78 kilogrammes. Santé robuste bien que d'estomac délicat et assez sujet aux migraines d'origine stomacale.

Dimanche 8 février 1914 - J'ai fini de déjeuner à 14 heures.

16 heures 15'- Pouls: 78. J'absorbe, dans 1/4 de verre d'eau sucrée, une cuiller à café d'extrait fluide. La saveur est très désagréable et laisse dans la bouche une amertume persistante.

16 heures 45'- Pouls: 72. Absorption d'une seconde cuiller à café d'extrait fluide.

17 heures - Pouls: 66. J'écris avec facilité quelques courtes lettres.

17 heures 15 - Sensation de plénitude stomacale provoquant de fréquents baillements. Nulle envie de dormir.

17 heures 45'- Ingestion d'une troisième cuiller à café d'extrait fluide. La sensation de gêne stomacale fait place à un état nettement nauséeux qui n'est pas particulièrement pénible mais qui, en s'aggravant jusqu'au vomissement, risquerait de compromettre la suite de l'expérience; pour y remédier, je me couche, et la nausée disparaît. Le jour baisse. J'allume le bec Auer éclairant ma chambre.

18 heures 30'- Pouls: 69. Ingestion de deux cuillers à café d'extrait fluide.

19 heures 30'- Je me lève et avale, avec une extrême répugnance, deux nouvelles cuillers à café d'extrait fluide dont la saveur provoque une violente nausée. Je me recouche et garde l'immobilité de peur de vomir.

J'ai donc absorbé jusqu'alors un total de 7 cuillers à café (35 cm3) d'extrait fluide, soit 0 gramme, 875 d'alcaloïdes totaux.

Pas de dépression musculaire; tous les mouvements sont possibles et faciles à exécuter sans aucun effort. Je peux me lever et marcher avec aisance. La station droite est cependant rendue pénible par un état vertigineux provoquant de désagréables envies de vomir. Pas de titubation, ni d'erreur de direction dans la marche. Je ressens, à peine accentué, un sentiment d'irréalité ou d'ivresse légère. La chambre et les objets environnants me paraissent plus éclairés que de coutume.

Je me recouche et ferme les yeux sur lesquels j'applique un bandeau épais pour les préserver de la lumière.

20 heures 30'- Des visions commencent à se produire, les yeux étant fermés. Elles sont d'une telle ténuité, que j'ai la sensation de les ressentir depuis plusieurs minutes déjà sans qu'elles aient attiré mon attention: ce sont d'abord des dessins géométriques, emplissant tout le champ visuel, semblables à ceux d'une tapisserie dont le fond serait gris perle et les ramages blancs; ils sont animés d'un mouvement de giration lent et continu. Puis apparaît une série de dessins en forme de sablier, formés de stries et analogues aux dessins de la lumière polarisée.

Ces visions sont, au début, si peu marquées que, pendant un moment, je les crois dues à un effet de tension cérébrale sur un phénomène attendu, ou à de l'autosuggestion. Je reconnaîtrai ce point de vue comme faux par la suite, lorsque les visions plus précises se présenteront inopinément dans mon champ visuel, sous des formes très inattendues, ni prévues, ni souhaitées.

A partir de ce moment, les visions vont se succéder avec une intensité progressivement croissante jusqu'à 21 heures, où le vomissement se produira, puis décroîtront, pour cesser complètement à 21 heures 30'.

La plupart des formes perçues au courant de cette intoxication seront d'une faible luminosité, comme mal éclairées et vues dans une demi obscurité, mais certains détails seront, par contre, d'une coloration intensément lumineuse, d'une vivacité de teinte, d'une pureté de coloris incomparable, et si petits qu'ils soient, ils sembleront illuminés intérieurement d'une clarté si vivante qu'ils donneront la sensation de n'en avoir jamais perçu de pareille et seront un véritable motif d'enchantement.

Les objets seront souvent vagues et imprécis comme dans une pénombre, pareils à des formes brumeuses qui tendraient à se matérialiser. Leur imprévu excitera vivement mon attention, et bien que ne les percevant que les yeux clos, leur imprécision m'obligera souvent à froncer inconsciemment les sourcils et le front, comme un myope concentrant sa vision pour mieux voir ces images intérieures.

Intelligence et sens critique absolument nets; toutes les visions ont été décrites, au fur et à mesure de leur production, à un camarade qui en prenait note. Aucune n'a été perçue les yeux ouverts. Aucun trouble dans la perception des choses extérieures. Pas d'hallucinations olfactives, auditives, gustatives ou tactiles.

ENUMÉRATION DES VISIONS (RÉSUMÉ)

Chute d'objets lumineux. Vision nette d'un visage humain. Vision d'un appartement avec ses détails, de masques, d'un candélabre puis encore de la même figure humaine.

21 heures - Nausée violente suivie de vomissement. Les matières rejetées sont composées des restes du déjeuner, colorées en brun verdâtre par l'extrait fluide non encore assimilé; elles ont une saveur désagréable de PEYOTL et laissent une sensation brûlante dans l'arrière gorge.

Ceci fait, mon malaise stomacal disparaît entièrement; je me trouve tout à fait à mon aise en position horizontale.

Vision de deux cornes pointues, de couleur bleue, d'éclairs, de gravures, masques, d'un tunnel convergeant vers l'infini. Vision de deux figures humaines, d'un lion.

21 heures 30'- Toutes les visions sont terminées.

Je me lève. La marche est normale et aussi assurée qu'à l'ordinaire. Seul, persiste un état vertigineux qui disparaît dès que je me recouche. Il m'est impossible de dormir jusqu'au lundi matin 4 heures. Je me lève à 6 heures et travaille tout le jour, debout, jusqu'à 20 heures, dîne et veille jusqu'au mardi matin 1 heure, sans fatigue. Je constate seulement le léger gonflement des extrémités inférieures que je ressens habituellement après une période de surmenage.

L'apparition, la procession et la nature des visions ne furent, à aucun degré, soumises à l'influence de la volonté".

Posologie (addition de produits sucrants pour éviter la nausée)

Extrait fluide à P.E. de "mescal buttons": 5 à 15 grammes

Extrait fluide de réglisse à 50% d'extrait mou: 5 à 15 grammes

Sirop, Q.S. pour 150 cc.

Une cuiller à soupe représente 0, gramme 50 à 1 gramme, 50 d'extrait fluide à P.E.

Dose: 4 à 6 cuillers, par jour.

TOXICITÉ ET PHARMACODYNAMIE (D'APRÈS ALEXANDRE ROUHIER EN SON OUVRAGE PRÉCITÉ)

Per Os, le Peyotl ne semble pas toxique pour l'homme. Pris à trop forte dose, il est émétique.

Le poids de Peyotl nécessaire pour obtenir l'ivresse mescalinique varie évidemment selon les individus et surtout selon la richesse alcaloïdique de la plante.

HAVELOCK ELLIS absorba trois mescal buttons (10 grammes environ); HEFFTER, cinq mescal buttons (16 grammes, 60 de drogue à 6% d'alcaloïdes totaux); J. MOONEY, PRENTISS et MORGAN, sept mescal buttons (23 à 25 grammes); ESHNER et WEIR MITCHELL, 12 et 13 grammes 60 d'extrait fluide à poids égal et A. ROUHIER, 35 grammes.

Les indiens Kiowas prétendent (fide Mooney) qu'aucun effet cérébral n'est obtenu à moins de 10 mescal buttons (30 à 40 grammes environ); "12 à 15 pour un individu sont un nombre courant pendant une nuit et beaucoup en ont mangé 30 et plus à l'occasion". C'est le cas de l'Indien Zuanah, premier grand prêtre du rite chez les Comanches; cela ne l'a pas empêché de traiter, le lendemain, les affaires courantes qui l'occupent.

Il est courant que certaines personnes mâchent 10 mescal-buttons, l'un après l'autre, comme des pastilles. Certains enfants, lors de leur initiation, en avalent 6 la nuit.

Un mescal-button ne représente guère qu'une petite plante fraîche ou bien la moitié d'une grosse; il ne pèse en moyenne que 3 grammes, 30 à 4 grammes. Les Indiens n'utilisent que la partie aérienne de la plante. Les plus avisés ne tranchent que cette partie, afin de préserver la racine qui donnera alors naissance à plusieurs têtes de PEYOTL, par bourgeonnement.

Il semble possible, en comparant les quantités de drogue absorbée par les Indiens des prairies (qui l'emploient à l'état sec) et par ceux du Mexique (qui l'emploient à l'état frais) que l'activité de la drogue soit quelque peu modifiée par la dessiccation. LUMHOLTZ constata lui-même un effet cérébral, avec production de visions colorées, après avoir mangé un seul "hicouri" (peyotl), frais.

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